Du haut de ses plus de 20 ans d’expérience en game design, des quelques bouquins qu’il a signés sur le sujet et de son passé de prof au MIT, à l’université du Texas ou à la New-York university, Eric Zimmerman n’est pas exactement n’importe qui dans le monde du jeu vidéo. C’est même une référence. Alors quand il a publié sur Kotaku un Manifeste pour un siècle ludique, je l’ai lu avec grand intérêt. Et j’ai été surpris et enchanté d’y retrouver le cœur de l’analyse qui me fait, aujourd’hui, consacrer ma vie professionnelle aux newsgames, ces jeux qui ont pour but de rendre apparents et de faire comprendre les systèmes qui nous entourent.
Alors du coup, je lui ai demandé la permission de traduire ledit manifeste et de le reproduire ici, ce qu’il a élégamment accepté. Je vous invite à le lire – et à donner votre avis dessus dans les commentaires. Allez, les trois premiers gagnent 10 points chacun !
Manifeste pour un siècle ludique
par Eric Zimmerman
Les jeux sont anciens.
Au même titre que la composition musicale, l’élaboration d’histoires ou la création d’image, le fait de jouer à des jeux fait partie de ce qui nous définit en tant qu’humains. Les jeux sont même probablement le premier type de systèmes interactifs que notre espèce ait inventé.
La technologie numérique a donné une nouvelle pertinence aux jeux.
Dans notre culture, le développement de l’informatique a accompagné un renouveau des jeux. Ça n’a rien d’un accident. Les jeux comme les échecs, le Go, ou le Parcheesi ont un point commun avec les ordinateurs : ce sont des machines créées pour générer et emmagasiner des états numériques. Si on considère les choses ainsi, ce ne sont pas les ordinateurs qui ont créé les jeux mais les jeux qui ont créé les ordinateurs.
Le XXe siècle était le siècle de l’information.
La théorie des systèmes, les théories de la communication, la cybernétique, l’intelligence artificielle, l’informatique… Ces champs de recherche, qui ont pour la plupart émergé bien avant l’avènement de l’ordinateur, ont participé à la « révolution de l’information”.
L’abstraction de l’information a rendu possibles des bureaucraties et des technologies extrêmement complexes, du télégraphe et des réseaux téléphoniques au NASDAQ et à Facebook.
Dans notre siècle ludique, l’information est devenue un jeu.
Nos réseaux informationnels ne sont plus composés de catalogues de cartes ou d’entrelacs de tubes pneumatiques. Les réseaux digitaux sont flexibles et organiques.
Au cours des dernières décennies, l’information s’est ludifiée. Un des exemples originels est celui de Wikipedia. Wikipedia n’est pas un entrepôt de connaissances parfaitement ordonné. C’est une communauté bordélique et chaotique, dans laquelle les utilisateurs sont aussi les experts, créant l’information ensemble tout en faisant évoluer le système informatif.
Au cours du XXe siècle, l’image animée a été la forme culturelle dominante.
Bien sûr, la musique, l’architecture, la littérature et bien d’autres formes d’expression ont connu une activité florissante au siècle dernier. Mais l’image animée s’est imposée. Le storytelling personnel, les reportages journalistiques, les récits épiques, la propagande politique – à chaque fois, c’est le film et la vidéo qui ont donné le plus de force à ces discours.
L’avènement de l’image animée est étroitement lié à l’avènement de l’information. En tant que média, le film et la vidéo représentent une information linéaire, non interactive, devant laquelle nous sommes spectateurs.
Le Siècle ludique est l’ère des jeux.
Quand l’information devient ludique, les expériences qui s’inspirent du jeu remplacent les média linéaires. L’expression médiatique et la culture, dans le Siècle ludique, sont de plus en plus systémiques, modulaires, modifiables et participatives. Les jeux sont une incarnation très directe de toutes ces caractéristiques.
De plus en plus, les gens vont consacrer leur temps de loisir, consommer de l’art, du design, du divertissement sous forme de jeux – ou au moins sous forme d’expériences qui ressembleront beaucoup à des jeux.
Nous vivons dans un monde de systèmes.
La façon dont nous travaillons, dont nous communiquons, dont nous cherchons, dont nous apprenons, dont nous socialisons, dont nous vivons nos histoires d’amour, dont nous gérons nos finances, dont nous interagissons avec notre gouvernement… toutes ces activités dépendent intimement de systèmes d’information complexes – ce n’était pas le cas il y a encore quelques décennies à peine.
Les jeux s’insèrent tout naturellement dans une société qui laisse une si grande place aux systèmes. Bien sûr, on pourrait dire qu’un poème ou une chanson est un système. Mais les jeux sont des systèmes dans un sens beaucoup plus littéral : qu’on parle de poker, de Pac-man, ou de World of Warcraft, les jeux sont des machines dont les données entrent et sortent, qu’on habite, qu’on manipule, qu’on explore.
Il y a un besoin de ludique.
Avoir la compréhension des systèmes, réussir à les analyser, ce n’est pas suffisant. Nous devons aussi apprendre à les considérer de manière ludique. Un système ludique devient plus humain, il devient un système social, riche de ses contradictions et de ses possibilités.
L’approche ludique est le moteur de l’innovation et de la créativité : en jouant, on réfléchit sur la manière dont on pense, et on apprend à changer notre façon d’agir. Et en tant que forme culturelle, les jeux ont une connexion particulièrement directe avec le ludique.
Nous devons penser comme des designers.
Dans le Siècle ludique, nous ne pouvons pas avoir avec les systèmes qui nous entourent une relation passive. Nous devons nous muer en designers, être capable de reconnaitre comment et pourquoi les systèmes sont conçus, et essayer de les améliorer.
L’automobile a mis des dizaines d’années pour évoluer du statut d’occupation pour passionnés nécessitant une connaissance extrêmement pointue à celui de bien de grande consommation. La technologie digitale, constamment changeante, empêchera peut-être toujours les systèmes matériels et logiciels, qui nous entourent désormais, de se stabiliser de cette façon. Pour être vraiment en accord avec notre monde de systèmes, nous n’avons donc pas d’autre choix que celui de penser comme des designers.
Les jeux sont comme un langage à acquérir.
Les systèmes, le jeu, le design : ce ne sont pas seulement des aspects du Siècle ludique, ce sont aussi des éléments de l’alphabétisation ludique. Être alphabétisé, c’est être capable de créer et de comprendre du sens, c’est ce qui permet aux gens d’écrire (créer) et de lire (comprendre).
Dans les dernières décennies, nous avons identifié de nouveaux types d’alphabétisation : visuelle, technologique… Mais dans le Siècle ludique, être vraiment alphabétisé, c’est aussi maîtriser le langage des jeux. La place prise par les jeux dans notre culture est à la fois la cause et la conséquence de l’alphabétisation aux jeux dans le Siècle ludique.
L’alphabétisation aux jeux peut nous aider à nous attaquer à nos problèmes.
Pour résoudre les problème auxquels le monde doit aujourd’hui faire face, il faut adopter le mode de pensée que l’alphabétisation aux jeux engendre. Comment le prix du litre d’essence en Californie influence-t-il la politique au moyen-Orient, quelle influence cette politique a-t-elle sur l’écosystème amazonien ? Ces problèmes nous forcent à comprendre comment les partie d’un système s’enclenchent les unes dans les autres, créant ainsi un monde complexe, avec des effets émergents. Pour les comprendre, nous devons penser de manière ludique, innovante, transdisciplinaire ; ainsi nous pourrons analyser ces systèmes, les re-designer et les transformer en quelque chose de nouveau..
Dans le Siècle ludique, tout le monde sera game designer.
Les jeux modifient la nature de la consommation culturelle. La musique est jouée par les musiciens, mais la plupart des gens ne sont pas des musiciens – ils écoutent la musique que quelqu’un d’autre a faite. A l’opposée, les jeux requièrent une participation active.
Le game design implique de maîtriser la logique des systèmes, la psychologie sociale, et d’être un bidouilleur de culture. Quand on joue a un jeu en profondeur, on est naturellement amené à penser comme un game designer – à le remanier, à tenter de comprendre comment il a été conçu, à le modifier pour trouver de nouvelles façons d’y jouer. Dans le Siècle ludique, au fur et à mesure que de plus en plus de personnes joueront en profondeur, la ligne de séparation entre joueurs et game designers sera de plus en plus ténue.
Les jeux sont magnifiques. Ils n’ont pas besoins d’être justifiés.
C’est vrai par-dessus tout : si les jeux ont de la valeur, ce n’est pas avant tout parce qu’ils peuvent apprendre quelque chose à quelqu’un ou transformer notre monde. Comme d’autres formes d’expression culturelle, les jeux et l’action de jouer sont en premier lieu importants parce qu’ils sont magnifiques.
Apprendre à apprécier l’esthétique des jeux – la façon dont les systèmes interactifs dynamiques sont capables de créer de la beauté et du sens – c’est l’un des challenges les plus enthousiasmants, et aussi l’un des plus ardus auxquels nous ayons à faire face dans ce Siècle ludique sur lequel le jour se lève.
Four things:1. Comeititpon. Let schools compete.2. Take Dept. of Ed money and give it to parents who need it to send their kid to a better school.3. Shorten school career from 12 to 11 years.4. Direct smart bookish kids to college and smart or not so smart unbookish kids to trade school.
Chris14/09/2012Doctor, hace 20 dÃas me realizaron una septoplastia funcional y reducción de cornetes, al realizarme los lavados pasa el lÃguido de una fosa nasal a la otra, esto es normal? como puedo saber si la operación fue exitosa?.Muchas gracias.